Rêvons ensemble une école du 21e siècle suite

Judit VaradiLe mythe de la vérité est tellement puissant, qu’il parvient à voiler toutes les vérités…
Pour repenser l’école en fonction des réalités et besoins actuelles – réalités qui résultent des profonds et rapides changements qui ont bouleversé notre société au cours des dernières décennies – nous allons aborder 1) le contenu des savoirs à transmettre : les programmes scolaires 2) la manière dont ces contenus sont transmis : l’approche pédagogique 3) la formation des personnes responsables de la transmission : la formation des enseignants
1) Les programmes scolaires
Quels savoirs, messages et valeurs voulons-nous transmettre aux générations suivantes ? Quelles disciplines enseigner et comment ? Quelles compétences assurer à quel âge ?
Déterminer et élaborer des programmes scolaires consiste à répondre à ces questions fondamentales que toutes les sociétés se posent de façon consciente ou inconsciente, explicite ou implicite.
Dans un monde de plus en plus complexe où les interférences entre différents secteurs se multiplient chaque jour, il importe de mettre en place des programmes facilitant la réflexion à la fois globale et pluridimensionnelle, permettant de faire des liens entre différents niveaux d’analyse : imaginons par exemple un cours où les enfants de 9-10 ans étudieraient le cerveau humain et en même temps les effets néfastes des produits narcotiques. Un tel cours se situerait au carrefour de la biologie, de la chimie et de la prévention de la toxicomanie. Exposés à ce risque plus tard, ces enfants disposeraient déjà des informations qui les aideraient à résister à la tentation de la drogue. Ce type de démarche suppose que les maîtres puissent aborder des sujets relevant à la fois de la biologie, de la médecine, de la chimie et de la prévention sociale.
Des cours d’initiation aux sciences sociales et humaines pourraient préparer les enfants à faire face à des pressions sociales de plus en plus oppressantes dans une société où les échanges interpersonnels deviennent de plus en plus problématiques. Des nouveaux contenus relevant de l’étude de la communication, de la psychologie et de la sociologie pourraient compléter les programmes scolaires actuels afin d’améliorer le climat à l’école et dans la rue, de diminuer la violence et l’incompréhension dans les familles et à l’école et de rendre les rapports sociaux en général plus maîtrisés, plus civilisés et plus chaleureux.
L’étude de l’histoire est traditionnellement présentée en ordre chronologique, partant de l’âge des cavernes jusqu’à l’époque contemporaine. Les enfants se sentiraient peut-être plus concernés par l’étude de l’histoire si cette discipline était abordée en partant des réalités contemporaines, celles que l’enfant connaît, pour retourner progressivement dans le temps vers la révolution française, vers la monarchie, la renaissance, le moyen-âge, jusqu’à l’âge des cavernes et au-delà.
Partir du connu pour explorer l’inconnu est la direction naturelle de tout apprentissage.
La géographie pourrait apparaître comme une série de passionnantes découvertes grâce à des témoignages d’enfants du même âge mais d’autres pays et continents, grâce à des films documentaires sur des pays lointains.
En ce qui concerne l’enseignement des langues étrangères, des méthodes gratifiantes et efficaces existent aujourd’hui, mais ne sont utilisées que dans des cas isolés et grâce à l’initiative personnelle de quelques enseignants imaginatifs et courageux. Les enfants commencent l’apprentissage d’une langue étrangère à l’école vers 8 ans et poursuivent l’étude de cette langue tout au long de leur scolarité. Or, au terme de la scolarité obligatoire et même après l’obtention de la maturité gymnasiale, les jeunes ne disposent en général que de modestes connaissances des langues étrangères étudiées et n’ont pas de véritable autonomie dans la communication écrite et orale.
L’enseignement de la lecture et de l’écriture de la langue maternelle a été malmené par des changements successifs d’approche pédagogique qui ont déstabilisé enseignants et parents et firent de plusieurs générations d’enfants les sujets passifs d’expérimentations pseudo-scientifiques. S’agissant de compétences déterminantes pour l’acquisition de quasiment toutes les autres compétences, il serait primordial de définir une ligne de conduite pédagogique cohérente et efficace rendant l’apprentissage de la lecture et de l’écriture accessible et agréable.
L’informatique, devenue incontournable sur le plan pratique, nous projette au cœur de la problématique générale de la gestion de l’information devenue trop nombreuse, trop peu structurée et souvent envahissante. Se frayer un passage dans la jungle des connaissances, savoir distinguer les sources d’information sérieuse de la propagande suppose des savoir-faire et des méthodes de recherche que l’école devrait enseigner.
L’enseignement des religions sous forme de découverte respectueuse des diverses croyances et pratiques religieuses pourrait encourager une certaine autonomie de réflexion face à des sujets complexes et délicats comprenant des dimensions à la fois sociales, religieuses et identitaires et servir de rempart contre la tentation des fondamentalismes. Dans ce domaine, des initiatives ponctuelles visant à créer un climat de tolérance voient déjà le jour dans certaines écoles et jouent un rôle de prévention contre la violence et le fanatisme. De tels programmes pourraient être introduits de manière systématique dans les programmes scolaires. En effet, il est possible d’expliquer à des enfants, même petits, que le vrai problème de la violence est la relation à l’autre et que si les religions peuvent être utilisées à justifier la violence, elles ne sont pas pour autant les causes réelles de cette dernière.
Dans le prochain numéro : repenser l’approche pédagogique.
Judit Varadi
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