Lumière sur Étienne Dinet Peintre algérien d’adoption, adoré passionnément !

Lumière sur Étienne Dinet Peintre algérien d’adoption, adoré passionnément !

L’institut du monde arabe à Paris inaugure l’année 2024 avec une exposition consacrée à l’artiste peintre Étienne Dinet. Cette rétrospective intitulée

« Etienne Dinet, une passion algérienne » se tiendra du 30 janvier au 9 juin 2024. Elle propose une immersion dans l’Algérie telle que perçue par cet artiste emblématique de l’orientalisme. Dinet s’est remarquablement imprégné des nuances de la culture algérienne, à tel point qu’il en a été adopté comme citoyen, témoignant d’une fusion rare entre l’artiste et son sujet d’inspiration. Cet événement culturel offre une immersion dans l’univers artistique d’Etienne Dinet, où se reflète son attachement indéfectible au pays qui a su inspirer son pinceau.

Natif de France, Étienne Dinet s’est pleinement intégré en Algérie, où il vécut de 1861 jusqu’à sa mort en 1929. Parmi les artistes orientalistes, il se distingue par son immersion sincère, évitant ainsi les écueils de l’exotisme et les critiques d’une perspective colonialiste. Cette exposition propose une exploration de son héritage artistique, qui s’inscrit profondément dans l’imaginaire visuel de l’Algérie post-indépendance. Son œuvre témoigne indéniablement d’un engagement profond envers le pays. Il a adopté non seulement sa terre, mais également sa foi et ses aspirations.

Etienne Dinet se distingue comme un éminent représentant de l’orientalisme artistique des XIXe et XXe siècles, contribuant de manière significative à l’imaginaire visuel et culturel de l’Algérie. Parisien, très tôt, il s’oriente vers le domaine artistique, embrassant avec ferveur la photographie et la peinture. Sous l’influence de maîtres tels que Delacroix et Rembrandt, il s’attache à capturer la vérité de l’instant par une étude des couleurs et de la lumière, dans une quête constante de réalisme…. À travers son pinceau, Dinet transcende la vision idyllique d’un monde filtré par le prisme européen. Il ne se contente pas de représenter la violence, la précarité, le désespoir et l’humilité ; il illustre aussi la joie, le courage et la dignité, hommes et femmes, jeunes et vieux, vêtus de leurs habits traditionnels et ornés de leurs bijoux, témoignant ainsi d’une approche nuancée et profondément humaine de son sujet.

En 1884, lors d’un voyage aux côtés d’un compagnon, l’artiste fait sa visite en Algérie. Cette rencontre avec ce pays provoque chez Dinet une fascination immédiate. Il y consacre dès lors tous ses étés, à peindre, capturant avec passion, l’essence des oasis du Sud algérien, au gré de ses toiles. Convaincu par la richesse de ce terroir, il élève l’Algérie au rang de muse exclusive, concrétisant son attachement par une installation dans l’oasis de Bou-Saâda à la porte du Sahara, où il poursuit son œuvre renonçant à toute autre source d’inspiration en dehors des sujets algériens. Il y achète une maison dans la ville indigène pourvue d’une terrasse de laquelle il peut à loisir contempler le monde qu’il s’est choisi. Étienne Dinet, que la photographie passionnait, peint des instantanés de vie. De la nature, il cherche à peindre le jaillissement de l’eau et la végétation, mais également le désert comme espace à la fois hostile et familier. Mais ce sont avant tout les habitants du Sahara qui sont au centre de ses préoccupations. Dans l’univers d’Etienne Dinet, chaque toile constitue un chapitre d’une histoire d’amour inconditionnelle avec l’Algérie. Ces créations incarnent une déclaration ardente à ce pays, capturant les regards par leur clarté radieuse et leur vitalité débordante.

Dans l’œuvre de Dinet, la spiritualité musulmane s’inscrit avec autant de prégnance que les paysages ou les figures humaines. Qu’elle se manifeste dans l’intimité ou dans la sphère collective, la foi se révèle à travers une palette d’expressions et de comportements empreints de piété et d’humilité, qui ont profondément marqué l’artiste. Sa propre conversion à l’islam, en 1913, sous le nom de Nasreddine, témoigne de l’impact de cette dévotion sur son parcours. Avec l’éclatement de la Première Guerre mondiale en 1914, Dinet intensifie son engagement en faveur des musulmans mobilisés sur le front. Il assume un rôle civique de premier plan, intercédant pour la reconnaissance des sacrifices des soldats autochtones et s’efforçant d’assurer le rapatriement des blessés algériens, le respect des rites funéraires islamiques et la mise en place de stèles appropriées sur les tombes, dont il conçoit lui-même les modèles.

En 1929, Étienne Dinet accomplit le pèlerinage à La Mecque, acte de foi précédant de peu son décès survenu la même année. Conformément à ses dernières volontés, il est inhumé à Bou-Saâda. La République française le reconnaît comme une figure clé du rapprochement franco-musulman. Le président Paul Doumer rend hommage à son héritage en inaugurant personnellement la rétrospective posthume dédiée à l’artiste, un an après sa disparition.

L’exposition, prévue pour se poursuivre jusqu’à l’arrivée des premières chaleurs de juin 2024, mérite que l’on s’y attarde sans tarder. La splendeur de cet événement, qui se distingue par son caractère incontournable, appelle à une découverte sans délai !  Une exposition à ne pas manquer. F. Guemiah.

Commissariat de l’exposition

Mario Choueiry, historien de l’Art est chargé de mission à l’Institut du Monde Arabe, enseignant en histoire de l’art à la Sorbonne Abu Dhabi et à l’École du Louvre, il intervient régulièrement auprès des étudiants l’Ecole de management des industries créatives (EMIC). Après des études d’économie et sciences politiques, il commence sa carrière chez Media 7 au service classique. Il intègre ensuite le label Erato avant de devenir, pendant plus de dix ans, le représentant à l’international du label EMI Arabia. Il s’occupe de faire connaître le vaste catalogue de musique arabe  Fairuz, Oum Kalthoum, Abdel Halim Hafez, Ziad Rahbani … en dehors du monde arabe. Il est membre des comités scientifiques des expositions « Divas arabes » et « Hip-Hop du Bronx aux rues arabes ». Il est commissaire de l’exposition « Picasso et les avant-gardes arabes ». Né à Beyrouth en 1969, Mario Choueiry vit à Paris depuis son adolescence.

  • Institut du monde arabe à Paris
  • Exposition « Étienne Dinet, passions algériennes »
  • 30 janvier 2024 – 9 juin 2024
  • Exposition réalisée en partenariat avec l’IMA-Tourcoing
  • Avec le soutien exceptionnel du Musée d’Orsay