Au terme d’un mois de négociations difficiles, les pays membres ne sont pas parvenus à un consensus sur un texte qui aurait pu devenir un outil juridiquement contraignant pour lutter contre un commerce meurtrier. Les Etats-Unis ont demandé plus de temps pour finaliser le texte, « par crainte d’un blocage au Congrès ». La Russie la Chine, l’Inde, l’Indonésie et l’Egypte leur ont emboite le pas.
Le texte soumis au vote des Etats, reprend les deux principaux objectifs des ONG : réguler un certain nombre d’armes et imposer la règle d’or sur les droits de l’homme et le droit international humanitaire. Le texte ne couvre cependant pas l’ensemble des armes, et le point sur les munitions a été la source de débats houleux, particulièrement avec les Etats-Unis dont les objections ne sont pas seulement juridiques mais politiques. Pour exemple, parmi les armes offensives, on trouve un hélicoptère de combat mais pas un hélicoptère de transport de troupes.
« Le texte que j’avais proposé était un projet de traité. Certains pays ne l’aimaient pas mais l’immense majorité étaient d’accord », a déclaré le président de la conférence, l’Argentin Roberto Moritan, qui a expliqué qu’une des possibilités est de demander à l’Assemblée générale de l’ONU de décider « s’il doit y avoir de nouvelles négociations et quand ». La prochaine session de l’Assemblée générale se tiendra fin septembre à New York.
Le négociateur français, l’ambassadeur Jean-Hughes Simon-Michel, a quant à lui qualifié cet échec de « plus mauvais scénario possible » car il ne donne pas de perspective claire. « Le risque est de repartir de zéro quand la négociation reprendra. Le bilan est assez frustrant et la balle est désormais dans le camp de l’Assemblée générale », A-t-il déclaré.
Le rapport que Roberto Moritan doit remettre à l’Assemblée générale, proposera de reprendre les négociations début 2013. « Je suis certain que nous aurons un traité rapidement » a-t-il déclaré sans toutefois donner de délai.
« Les Etats-Unis ont fait dérailler le processus et il faudra attendre l’élection présidentielle américaine de novembre pour sortir de l’impasse », a déploré un diplomate occidental. Scott Stedjan, le responsable d’Oxfam America, a critiqué « le manque de courage de la Maison-Blanche, tandis que Daryl Kimball, le directeur de l’Association américaine pour le contrôle des armements, s’en ai pris « au manque de volonté politique du président Obama qui n’a pas saisi cette occasion historique ». « Nous nous retrouvons avec un résultat incertain qui jette un doute sur le soutien à un traité de la part des principaux exportateurs et importateurs d’armes, dont les Etats-Unis et la Russie », a-t-il souligné.
Quatre-vingt-dix pays, dont ceux de l’Union européenne et des Etats d’Amérique latine, des Caraïbes et d’Afrique, ont signé un communiqué dans lequel ils se sont déclarés déçus mais pas découragés. Ils sont déterminés, disent-ils, à obtenir un traité sur le commerce des armes.
Un optimisme qui risque d’être mis a mal par un autre groupe d’Etats (Syrie, Iran, Corée du Nord et Cuba) qui, depuis le début des discussions, se montrent réticents à un traité contraignant visant à réglementer le commerce des armes conventionnelles dont le marché est estimé à 70 milliards de dollars par an.
Célhia de Lavarène, Nations Unies, New York 30 juillet 2012