La Maison de l’UNESCO à Paris, en étroite collaboration avec l’Ambassade d’Irak en France et la délégation irakienne auprès de l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture, accueille deux évènements exceptionnels, une exposition de premier plan pour la saison automnale et un concert spécial du célèbre musicien irakien, mondialement Naseer Shamma, artiste de l’UNESCO pour la paix.
Intitulée « Trois murs, narration spatiale de la vieille ville de Mossoul », l’événement est conçu par le « Musée des Prisons de l’ISIS » (IPM). L’objectif est de retracer le parcours historique de Mossoul, une cité au patrimoine architectural séculaire, qui a subi des dommages considérables et des transformations irréversibles durant l’occupation par l’État Islamique. Cette exposition représente un effort pour renouer avec la mémoire collective de Mossoul et souligner la valeur inestimable de son héritage culturel et architectural.
L’inauguration de l’exposition sera suivie du concert « Un voyage musical du cœur de Mossoul vers le monde » dirigé par le maestro irakien, Naseer Shamma, auteur, compositeur, célèbre joueur de luth oriental et artiste de l’UNESCO pour la paix, accompagné de son ensemble de musiciens du monde afin de célébrer les traditions musicales ancestrales de cette ville, qui possède un patrimoine culturel unique et une portée mondiale.
L’exposition s’attache à la reconstitution virtuelle des édifices emblématiques de l’ancienne Mossoul, recourant à la narration numérique et aux visites en trois dimensions pour redonner vie à l’espace architectural. Au-delà de son aspect innovant, elle vise à raviver la mémoire collective et souligner le poids du patrimoine culturel et architectural. Trois sites majeurs sont mis en avant : une mosquée, une église et une demeure familiale. Ces lieux, jadis imprégnés d’histoire et de culture, ont été transformés en prisons par l’État Islamique lorsqu’il tenait les rênes de la ville. L’exposition dévoile cette sombre page. Elle nous invite à réfléchir sur le passé et ses traces encore palpables, tout en mettant en perspective les défis actuels de conservation et de restauration.
Au fil du parcours virtuel, le visiteur découvre ainsi comment ces espaces ont été détournés ; comment des murs ayant abrité foi et traditions se sont mués en geôles silencieuses. Un témoignage poignant qui renforce notre compréhension de l’impact dévastateur des conflits sur le patrimoine. Cette exposition se donne pour mission d’illuminer les esprits quant à la richesse patrimoniale de Mossoul et souligne l’impératif de sa sauvegarde pour l’héritage des générations à venir. À travers ses panneaux explicatifs et ses œuvres, elle met en lumière l’architecture singulière de la ville ancienne – une architecture marquée par l’albâtre et la brique, matériaux locaux qui imprimaient à Mossoul son identité remarquable. Au fil du parcours, le visiteur découvre le destin tragique d’édifices historiques. Des maisons, des mosquées, des églises ont été réduits en cendres ; certains servant de geôles involontaires, d’autres victimes des assauts destructeurs.
Innovante, l’exposition recourt aux technologies actuelles, prenons pour exemple les visites virtuelles, afin de ressusciter trois sites emblématiques : la maison familiale Meydan; l’église syriaque catholique; sans oublier la grande mosquée al-Nouri. Ces reconstructions virtuelles dévoilent avec précision et une pointe de mélancolie, les transformations subies durant le joug de l’État Islamique. La conversion forcée en prisons n’est qu’une facette de cette sombre période. Ainsi se déploie devant vous un panorama où passé et présent s’entrelacent ; où chaque pierre raconte une histoire, parfois douloureuse ; où chaque espace restauré numériquement clame la résilience d’un patrimoine que nous nous devons de transmettre intact. L’exposition se compose de témoignages poignants provenant de membres de la communauté locale ayant traversé cette époque sombre, parmi lesquels figurent des récits d’anciens captifs des geôles de l’État Islamique.
Au-delà d’une simple documentation des ruines, elle s’affirme comme un vecteur essentiel pour la renaissance de la mémoire collective urbaine ; elle souligne avec force la valeur inestimable du patrimoine culturel et architectural. Cette exposition unique à la Maison de l’UNESCO, nous convie à une réflexion profonde sur les cicatrices laissées par l’occupation de Daech et le chemin parcouru depuis. L’inauguration de cette exposition événement, orchestrée par Karim Afnan, directeur de projet et soutenue par le Ministère de la Culture irakien, l’Ambassade d’Irak en France, sa représentation auprès de l’UNESCO à Paris, ainsi que le Dr. Saad Al Massoudi, conseiller et coordinateur est bien plus qu’un simple vernissage culturel. Elle est le symbole d’une résilience, d’une mémoire collective et d’un avenir à reconstruire. Au-delà des œuvres exposées, c’est une véritable narration qui se déploie à travers les salles de la Maison de l’UNESCO, une histoire de destruction, mais aussi de renaissance et d’espoir. Les visiteurs sont invités à traverser un espace transformé en un témoignage vivant de l’histoire récente de Mossoul, une ville qui, au-delà des séquelles de la guerre, aspire à la paix et au renouveau. L’événement, qui a su rassembler des personnalités publiques influentes de divers horizons, témoigne de l’importance de la solidarité internationale dans le processus de reconstruction et de réconciliation. C’est un rappel que l’art et la culture sont des vecteurs puissants de transmission de mémoire et d’instruments de guérison des sociétés. En définitive, la « Narration spatiale de Mossoul » n’est pas seulement une exposition, c’est un acte de transmission, un appel à ne pas oublier et à œuvrer ensemble pour que la culture triomphe de la barbarie. Elle nous invite à poursuivre le dialogue, à éduquer et à sensibiliser pour que les générations futures puissent hériter d’un monde où la paix et la beauté de l’humanité l’emportent sur la destruction et la haine.
En quittant les lieux, empreints de l’atmosphère solennelle et de la charge émotionnelle de l’exposition, nous emportons avec nous le devoir de mémoire et la responsabilité collective de contribuer, chacun à notre échelle, à la construction d’un avenir meilleur. C’est avec cette résonance que se clôt notre visite, non pas comme une fin, mais comme le commencement d’une réflexion qui, nous l’espérons, se prolongera bien au-delà des murs de la Maison de l’UNESCO.
Fatima Guemiah.